Dans un contexte de réduction globale du nombre de traitements, l’oïdium fait figure d’exception. Partout en France, le nombre de traitements augmente au-delà de l’effet millésime.
Voici ce que constate Fréderic Derolez, chef marché vigne chez Bayerà l’occasion de la 3e université de la firme. Après les grandes cultures c’était au tour de la vigne d’être sur le devant de la scène le 6 février à Montpellier. Pendant une journée, près de 200 conseillers viticoles se sont réunis pour débattre et comprendre l’oïdium.
Quelles explications donner à la présence et à la virulence plus forte de l’oïdium ?
Un climat plus favorable au champignon ? Une pression mildiou plus forte ? Une vigne plus vigoureuse, à la floraison étalée plus difficile à protéger ? Des matières actives moins efficaces ? Une cadence trop faible ? Un démarrage des traitements trop tardif ? Des volumes de bouillie plus faibles mais une technicité d’application constante ?...
D’une région à l’autre les avis diffèrent mais la dynamique de la maladie aussi. Un seul point les accorde. La pression de l’oïdium est multifactorielle.
Dans le Sud-Est, la faible pression mildiou ne doit pas faire oublier l’oïdium
La contamination puis la croissance du mycélium responsable de l’oïdium se sont déroulées sans un accroc. Les conditions météorologiques difficiles durant la phase végétative n’ont pas aidé les vignerons, celles hivernales non plus. Bernard Molot, de l’IFV Rhône-Méditerrannée explique :
Les vignes présentaient une grande hétérogénéité de maturité. Sur un même rameau on pouvait voir des bourgeons au stade coton quand d’autres étaient déjà au stade 5-6 feuilles. Mais la virulence de l’oïdium en 2012 ne doit pas être attribuée qu’aux conditions météo.
Le facteur humain est non négligeable. Dans le Sud-Est le risque mildiou était aisément gérable en début de saison. Des vignerons ont donc adopté une pulvérisation « light ». Les cadences trop longues, parfois tous les 23 jours, une vitesse de traitement trop rapide, etc. ont fait le jeu de l’oïdium.
Traiter dès le stade 5-6 feuilles dans le Sud-Est
Pour le spécialiste vigne, dans ces années comme 2012, il faut lutter contre l’oïdium avec des passages spécifiques et sans tarder. Le premier traitement est à faire dès le stade 5-6 feuilles dans le vignoble méditerranéen. En prévention, avant que l’oïdium ne soit visible.
Cela ne va pas à l’encontre d’Écophyto. Commencer plus tôt permet de finir plus tôt. Si l’on considère une période de protection de deux mois et demi avec une cadence de 14 jours, on arrive à 5-6 traitements. En 2012, la fourchette observée dans le Languedoc est bien plus large. Les vignerons qui ont traité à partir de l’émergence des symptômes ont fait des fongicides de « vengeance » inutiles. Quand l’oïdium est sporulé, les produits sont peu efficaces.
Fréderic Derolez approuve cette stratégie préventive :
Chez Bayer nous pensons qu’il faut traiter mieux plus tôt pour traiter moins plus tard. L’objectif de cette stratégie est de « casser » l’épidémie.
Du côté des vignobles plus septentrionaux cet avis n’est pas partagé.
Le premier traitement à 7-8 feuilles étalées est efficace dans le Beaujolais
Pour le Beaujolais, une année à oïdium précoce signifie l’apparition des premiers symptômes au stade 10 feuilles. Ceci a été le cas en 2012. D’habitude, nous les voyons plutôt à la veille de la floraison.
Pour Caroline Le Roux, conseillère viticole à la chambre d'agriculture du Rhône, le premier anti-oïdium est bien positionné au stade 7-8 feuilles étalées. Cette stratégie s’est montrée satisfaisante dans une année difficile comme 2012.
Pour la protection phytosanitaire, deux QoI (pression black-rot) et 3 IBS sont conseillés. Si d’aventure une année à pression précoce et intense se profilait, le soufre pourrait revenir dans les programmes. Pierre Petitot, de la chambre d’agriculture de la Côte-d’Or, n’utilise plus le conditionnel dans son discours. L’intérêt des poudrages de soufre en curatif est confirmé dans les parcelles sensibles en encadrement de la floraison.
La Bourgogne commence tôt « grâce » au mildiou mais s’interroge
La date de début de traitement contre l’oïdium n’est pas impactante. La plupart des traitements ont eu lieu à un stade précoce : 3-5 feuilles étalées. Il faut dire que 2012 a été une année inédite. Les pressions de mildiou et oïdium ont coexisté d’une manière exceptionnelle et ce malgré des cadences soutenues.
L’expérience de la campagne précédente ne remet pas en cause l’avis de Pierre Petitot. La période clé de la protection anti-oïdium est l’encadrement de la floraison. Les traitements avant le stade 7-8 feuilles sont « non indispensables ». La question est : comment les raisonner ?
L’absence de modélisation de la maladie est problématique. Il est aujourd’hui impossible de prédire localement la date des premières contaminations. Une bonne nouvelle émerge tout de même de cette campagne.
Le modèle SOV (Sral-IFV), qui donne une tendance globale sur le risque oïdium, avait prédit une pression importante. L’indice de risque en début de campagne était de 99/100 pour la Côte-d’Or. SOV se base sur les données climatiques des deux années précédentes.
Les années à oïdium suivraient des années à l’été chaud. Les vignes septentrionales de 2013 devraient être à l’abri ! La modélisation parcellaire n’est pas pour demain mais des progrès sont faits pour mieux encadrer la maladie.
La Champagne part au combat contre les idées recues
Il faut se détacher de l'addiction à la seule solution produit.
La phrase est lancée! Laurent Panigai de l'interprofession champenoise a été, au cours de l'université Bayer, le plus fervent opposant à la stratégie de lutte préventive. Pour lui, la qualité de la pulvérisation est plus importante que la date du premier traitement.
D'ailleurs les études du CIVC sont formelles : que l'on traite au stade 2-3 feuilles étalées ou au stade boutons floraux, l'intensité de l'attaque sur grappe est quasi équivalente.
Et vous, quelle sera votre stratégie anti-oïdium pour 2013 ?
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